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Publié par Marc M


Durant la Seconde Guerre mondiale, l'Organisation Todt a fait construire le « Judenlager », un camp de travail. De juillet 1942 à janvier 1944, 288 juifs déportés d'Anvers (Belgique) y furent internés et fabriquèrent du charbon de bois destiné à l'industrie allemande. Tous ces déportés furent transférés ensuite à Auschwitz, à l'exception des évadés. Il fut le seul camp pour Juifs en Champagne-Ardenne pendant la Seconde Guerre mondiale.


Ici se dressa de juillet 1942 à janvier 1944
le « Judenlager » des Mazures
antichambre de la mort avant Auschwitz

Près de 300 déportés juifs d'Anvers ( Belgique )
furent mis au travail forcé dans ce camp

237 sont morts ensuite à Aschwitz-Birkenau
Bergen-Belsen   Buchenwald  Dachau  Flossenbürg
Mauthausen  Natzwiller   Teresienstadt

27 survécurent aux camps

2 furent fusillés en Belgique après évasion

22 réussirent leur évasion

« Visiteur, observe les vestiges de ce camp et médite
que de quelque pays que tu sois, tu n'es pas un étranger.
Fais que ton voyage ne soit pas inutile,
que notre mort n'ait pas été inutile... »

Primo LEVI

 


Aux Mazures, les 288 porteurs d'étoile vont devoir construire leur propre camp. Selon le
"Rapport 31 au Gouvernement belge" :


- "Le travail forcé durait sur 10 à 12 heures par jour, avec une pose d'une heure à midi. Ce
travail couvrait toute la semaine à l'exception du dimanche après-midi.
Les détenus se retrouvèrent bûcherons, terrassiers, concasseurs, scieurs, transporteurs,
fabricants de charbon de bois."


Avec des humiliations, des punitions qui sont autant d'atteintes à la dignité humaine :
- "Des corvées furent irrégulièrement imposées avant ou après les heures de travail, des fois
en pleine nuit, ainsi que des dimanche après-midi...En position assise, les bras étendus raides,
sauter sur commandement ; ceux qui s’exécutèrent mal...furent battus... Rouler et ramper, des
fois même dans la boue... Marcher au pas, les genoux fort levés, puis raides, au trot, ensuite
courir au pas de course et ce à l’improviste... Porter des traverses (de chemin de fer
decauville) à longues distances à travers des obstacles, sans utilité... A la question : « Wehr is
müde ? » (qui est fatigué ?) les exercices redoublèrent..." (Rapport de Vital Lieberman au
Gouvernement belge, mai 1970).


Si Les Mazures servent de cadre à une exploitation du travail forcé de Juifs, ceux-ci s'y
trouvent aussi dans une antichambre d'Auschwitz. En effet, à peine la construction du
Judenlager est-elle achevée que la nuit des 23-24 octobre 1942, un appel s'y déroule pour
séparer les déportés entre une majorité (les non Belges, ceux qui n'ont pas épousé une Belge
et/ou une aryenne...) et un groupe qui reste sur place, perplexe. Le 24, la majorité est
reconduite vers la caserne Dossin de Malines, centre de rassemblement de Belgique pour les
déportations vers Auschwitz.


3 Justes : Emile Fontaine, Annette et Camille Pierron.
22 évasions seront réussies. Mais seulement 4 au départ du Camp même. Presque toutes se
situent dans le contexte de sa fermeture. En effet, le 4 janvier, un garde allemand prévient le
kommando descendu des Mazures à la gare de Revin pour y charger le charbon de bois
fabriqué au Judenlager. Il le prévient que le lendemain, il sera trop tard pour eux. Tous les six
vont recevoir l'aide du chef de gare, Léon Devingt, et conduits sains et saufs en Belgique par
la résistance.


Au soir du 4, les Juifs des Mazures sont consignés dans leurs baraques. Le 5 tôt matin, des
camions les descendent à la gare de Charleville. Un convoi de wagons à bestiaux va partir
pour Drancy avec des Juifs raflés dans les Ardennes et d'autres mis au travail dans des
colonies agricoles de la WOL.
Aussitôt, deux "Mazurois" s'enfuient séparément avant que ne se referment les wagons : Josef
Peretz qui retournera demander de l'aide au chef de gare de Revin et Nathan Szuster qui fera
appel à Emile Fontaine.
Parti pour sa funeste destination, le convoi s'arrête en gare de triage d'Amagne-Lucquy. Un
cheminot en profite pour débloquer le système de fermeture extérieure de l'un des wagons. Le
hasard voulut que ce soit celui de Juifs des Mazures. Reparti vers Reims puis Le Bourget-Drancy, le train ralentit très fortement pour franchir l'Aisne à Sault-lès-Rethel. Dix
"Mazurois" n'hésitent pas à en sauter Eux aussi n'ont pas oublié la promesse d'Emile
Fontaine. Celui-ci l'honorera en les prenant en charge (logement, nourriture, papiers,
tranferts...).
En ce début 1944, sa compagne, Annette Pierron est enceinte. Elle a rejoint sa mère, Camille
Pierron, en sa ferme de Buirefontaine à Aubenton. Ce sera l'un des points de chute des évadés
répartis dans la région. Tous les dix connaîtront la libération. Malheureusement, le 30 mars
1944, la gestapo tend à un piège à Emile Fontaine (sans lien avec les évasions des Juifs des
Mazures). Il tombera l'arme à la main sur la route d'Aubenton vers Besmont.
En 1946 déjà, douze déportés des Mazures apposèrent une plaque d'hommage en la Mairie
d'Aubenton :
- "A Emile Fontaine, âme de la Résistance ardennaise qui nous soutint et nous sauva sous
l'oppression allemande. Il se sacrifia glorieusement pour les survivants. Ses camarades
israélites belges du camp de concentration des Mazures."
Suivent les noms de : Aron Léopold, Casseres Abraham, Grün Henri, Kogel Charles et
Salomon, Lemer Salomon, Lieberman Vital, Liwschitz Jacob, Reicher Henri, Springer
Siegfried, Stockfeder David, Szuster Nathan.
En 2006, sur base d'un dossier porté par l'Association pour la Mémoire du Judenlager des
Mazures (présidée par Yaël Reicher, fille de l'un des évadés), Yad Vashem a reconnu Emile
Fontaine, sa compagne Annette Pierron et la mère de celle-ci, Camille Pierron, comme Justes
parmi les Nations pour avoir sauvé ces Anversois ayant refusé de se laisser conduire à la mort.
Ces trois Justes seront honorés à Paris, au Sénat, le 3 décembre 2007.
Une dernière précision : si sur les 288 Juifs des Mazures, 22 réussirent à s'évader, 239 périrent
à Auschwitz ou dans d'autres camps de la mort et seuls 27 y survécurent. .

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